L’ensemble des syndicats, associations et collectifs d’auteurs et autrices de BD ont annoncé hier que l’appel au boycott pour le festival d’Angoulême 2026 ne pouvait pas être levé. Même si d’énormes progrès ont, enfin, été enregistrés la semaine dernière, il reste bien trop de questions et de problèmes non résolus. Le SNE, syndicat professionnel des plus gros éditeurs, en a donc pris acte et a annoncé à son tour qu’ils ne se rendraient pas à l’édition 2026. On imagine mal comment pourrait se tenir encore un festival crédible, et ce malgré le déni de l’actuelle organisation.
Les États Généraux de la Bande Dessinée s’étaient jusqu’ici tenus à l’écart des appels au boycott, respectant la neutralité nécessaire à l’organisation de leur nouvelle grande enquête auprès des auteurs et autrices. Nous étions cependant en contact avec d’autres organisations d’auteurs et autrices actives sur le sujet.
Les EGBD ont cependant une particularité qui les oblige aujourd’hui à sortir de cette neutralité. Ayant été très actifs dans la précédente tentative de réforme du festival, en 2016, les EGBD s’étaient vu proposer par les pouvoirs publics de siéger dans l’ADBDA, l’Association pour le développement de la bande dessiné à Angoulême, qui avait été créée à l’époque pour réunir les financeurs publics et les autres acteurs du festival. On devait y côtoyer aussi l’association historique et les syndicats d’éditeurs et d’auteurs. C’est au sein de cette même ADBDA, forte de son importante représentativité, qu’a été enfin décidé, lors d’une assemblée générale jeudi dernier, que l’organisation du festival ne pouvait rester entre les mains des responsables du désastre actuel, et qu’une nouvelle manière de faire devait prévaloir pour l’avenir. Les pouvoirs publics ont donc clairement acté la nécessité d’en finir avec l’organisation actuelle, et lancé un processus de création d’une nouvelle gouvernance.
Les promesses des pouvoirs politiques sont claires, à commencer par celle d’y intégrer les auteurs et autrices, et de s’emparer de leurs demandes. Mais elles arrivent bien tard, presque dix ans après la crise précédente, et de trop nombreux mois après les premiers appels à ne pas participer à l’édition 2026. Surtout, ce ne sont que des promesses, ce qui est normal, on ne peut pas tout recréer en quelques jours. Mais les auteurs et autrices qui demandent des changements depuis des années et ont maintenu un bras de fer depuis des mois peuvent-ils se contenter de promesses ?
Enfin, si ces promesses sont très encourageantes, elles n’impliquent pas les organisateurs de l’édition 2026. Franck Bondoux et Delphine Groux, dirigeants contestés, ont annoncé leur retrait, mais cela ne peut pas suffire à rétablir la confiance ? Que veulent dire ces retraits alors que l’un garde le contrôle de l’entreprise organisatrice, 9e Art+ et l’autre, la présidence de l’association historique ?
Jamais cette crise n’aurait dû aller aussi loin. Elle est le résultat d’un mépris plus ou moins général pour ce que demandent beaucoup d’autrices et d’auteurs. C’est malheureux, mais cette crise a fait beaucoup trop de dégâts, et ils ne pourront être réparés que par du concret, non par des promesses.
Les EGBD n’auraient peut-être pas vu de raison suffisante de se positionner après tout cela, surtout vu l’efficacité des autres organisations d’auteurs et d’autrices. Cependant, il y a deux semaines, l’autre représentant des auteurs à l’ADBDA, le SNAC BD, a démissionné pour appuyer sa participation au boycott, laissant les EGBD seuls à y siéger pour les auteurs et autrices. Dès lors, il nous a paru impossible de ne pas nous positionner clairement, en particulier vis-à-vis des pouvoirs publics.
Ces derniers jours, nous avons aussi trouvé que trop de membres de l’ADBDA recommençaient à agir comme si ce n’étaient pas les auteurs et les autrices qui leur avaient forcé la main et forcé le destin du festival. Bien que seul membre auteurs de l’ADBDA, les EGBD ont eu l’impression d’être très peu consultés, comme si les premières décisions fortes prises, et sous prétexte d’urgence, on était déjà en train de reprendre la mauvaise habitude de ne pas se soucier des organisations d’auteurs. Cela ne peut que nous inquiéter.
Pour toutes ces raisons, les États Généraux de la Bande Dessinée ont donc rejoint l’inter-orga auteurs pour signer son dernier communiqué appelant clairement à ne pas aller au festival de la bande dessinée d’Angoulême en 2026.
Ce vendredi, l’ADBDA se réunira pour commencer à travailler sur l’avenir. Comme à leur habitude, les EGBD seront présents de manière constructive. Nous y porterons toutes les revendications des auteurs et autrices. De la réussite de ces premières étapes refondatrices dépend l’existence d’une nouvelle édition du festival d’Angoulême en 2027. Espérons que les pouvoirs publics comme les éditeurs ont, cette fois-ci, bien compris que les auteurs et autrices, avec toutes leurs attentes et leurs opinions diverses, doivent être au cœur de cette refondation. Nous y veillerons.
Les États Généraux de la Bande Dessinée
Ce communiqué :
2025_11_20_EGBD_communique.pdf
Le communiqué de l’inter-orga BD :
2025_11_18_inter_orga_BD_reponse aux financeurs publics.pdf
Les revendications de l’inter-orga BD :
2025_11_18_inter_orga_BD_revendications.pdf